Par Jean Wesley Pierre
Le 18 mai, date sacrée pour la mémoire nationale haïtienne, symbole de fierté, d’unité et de résistance, a été profané cette année dans les rues de Pétion-Ville. Les élèves du Lycée National de Pétion-Ville, au lieu d’honorer le drapeau, ce tissu rouge et bleu imbibé du sang des héros de l’indépendance, ont offert un spectacle désolant. Une mascarade de comportements déplacés, d’indiscipline flagrante, de mépris affiché pour la mémoire de nos ancêtres, même 5 jours après la honte est toujours là, les souvenirs hantent ceux qui sont encore fiers de la nation libre. Ce jour qui devait rappeler le courage de Dessalines, la vision de Pétion, et le sacrifice de milliers d’âmes combattantes, s’est transformé en une démonstration de la faillite morale de notre société.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi la jeunesse, censée être la flamme du renouveau, crache-t-elle désormais sur les braises sacrées de notre histoire ?
Cette débandade comportementale n’est pas une simple erreur de jeunesse. Elle est le fruit pourri d’un arbre gangrené à la racine : celui de l’absence de repères, du vide éducatif, du laxisme institutionnalisé. Cette honte nationale reflète, sans filtre, l’inaction des responsables de l’éducation nationale. Que dire du Directeur du lycée de Pétion-Ville, incapable de préparer ses élèves à la solennité d’un tel événement ? Que penser du Directeur Général du ministère de l’Éducation Nationale et du ministre lui-même, qui semblent tous deux déconnectés de leur mission républicaine ? Leur silence, leur absence, leur inertie sont complices de cette débâcle.
Et que dire de l’État haïtien, qui ose parler de redressement éducatif alors qu’il humilie, maltraite et affame les professeurs ? Ces femmes et ces hommes, piliers de la formation nationale, attendent des mois pour toucher leur salaire misérable. Comment espérer inculquer respect et discipline à des jeunes quand ceux qui les guident sont eux-mêmes méprisés, marginalisés, ignorés ?
Le drapeau haïtien n’est pas un simple ornement pour les célébrations officielles. Il est le symbole vivant de la lutte d’un peuple noir pour sa liberté. Il est le souvenir du sang versé, de l’humiliation vaincue, de l’humanité restaurée. C’est un héritage qui devrait inspirer chaque génération. Malheureusement, celle qui défilait ce 18 mai 2025 dans les rues de Pétion-Ville a prouvé qu’elle ne comprend ni son poids, ni sa portée.
Nous devons regarder en face cette réalité douloureuse : notre jeunesse ne respecte plus les symboles nationaux parce que nous, adultes, dirigeants, éducateurs, avons échoué à leur en transmettre le sens.
L’indignation ne suffit plus. Il faut une refondation morale, une vraie politique éducative, un engagement clair à payer dignement les enseignants, à imposer l’autorité éducative, à valoriser les modèles positifs.
Haïti ne pourra jamais se relever si elle trahit sa mémoire. Le drapeau que nous avons hissé à l’Arcahaie en 1803 ne mérite pas l’oubli, encore moins l’insulte. Le 18 mai 2025 aurait dû être une leçon de fierté. Il restera une plaie ouverte, une alerte urgente : notre patrie crie, et ses enfants ne l’entendent plus.
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