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Par la rédaction de Lawouze Infos

Le 18 novembre 2025, Haïti a vécu l’un de ces rares moments où l’histoire, le symbole et l’émotion collective se rencontrent pour redonner souffle à une nation épuisée. En s’imposant 2-0 face au Nicaragua, les Grenadiers ont décroché leur qualification pour la Coupe du Monde 2026, cinquante-deux ans après leur dernière participation en 1974.

La date, elle-même carregée d’une force particulière, n’est pas anodine. C’est le jour de la commémoration de la Bataille de Vertières, ultime conquête de l’armée indigène contre les forces napoléoniennes en 1803. Ce 18 novembre moderne est venu rappeler, à travers le football, l’énergie profonde d’un peuple qui triomphe toujours lorsque tout semble perdu.

La performance sportive haïtienne revêt un caractère d’autant plus exceptionnel qu’elle est marquée par une singularité historique : Haïti devient le premier pays au monde à se qualifier pour une Coupe du Monde sans jouer un seul match à domicile.

L’insécurité généralisée, la montée en puissance des gangs et l’effondrement des infrastructures sportives ont contraint la sélection à évoluer exclusivement à l’extérieur. Cette situation, qui aurait pu fragiliser l’équipe, est devenue un moteur de résilience. Les joueurs ont disputé chaque rencontre comme un acte de survie, comme une affirmation d’existence au nom d’un pays dont les stades sont silencieux mais dont les cœurs continuent de battre.

La qualification elle-même a été suivie d’une scène devenue emblématique : après leur victoire, les joueurs ont dû regarder sur un téléphone portable la fin du match Costa Rica–Honduras, attendant anxieusement le coup de sifflet final qui scellerait mathématiquement leur ticket pour le Mondial. Lorsque la confirmation est arrivée, l’explosion de joie a traversé les écrans et s’est propagée dans les rues de Port-au-Prince, du Cap-Haïtien, de Jérémie, de Jacmel, dans tout le pays et de la diaspora.

Dans un pays durement frappé par la violence, les kidnappings et la désespérance quotidienne, cette célébration spontanée a constitué un moment d’unité rare, presque sacré.
L’émotion vécue en Haïti a trouvé un écho immédiat à l’international.

Les États-Unis ont salué une performance qui « reflète le dévouement, la résilience et le talent de l’équipe et de la nation », avant d’ajouter : « Un moment de fierté pour tous les Haïtiens. Allez les Grenadiers ! ». L’Espagne a parlé d’un « spectaculaire exploit attendu depuis 1974 » et a rappelé avec chaleur que « l’Espagne et Haïti seront à la Coupe du Monde ». L’ancienne représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU en Haïti, Maria Isabel Salvador, a commenté avec sincérité : « On dirait que seul le football nous donne des joies. Félicitations aux Grenadiers Haïti, pour leur qualification à la Coupe du Monde 2026 ! ». Dans la diaspora culturelle, Wyclef Jean a jubilé en lançant : « What a header 2-0 let’s gooooooo #Haiti », tandis que Steeven Saba s’est exprimé avec un cri purement haïtien : « Amweyyyyy 🇭🇹». Le joueur international Jean Ricner Bellegarde a lui aussi inscrit ce moment dans l’intime et le collectif en déclarant : « 18 Novembre 2025 une date symbolique qui restera gravée à jamais… Fierté à jamais ». Ces voix ont accompagné l’élan populaire qui a envahi les rues et les réseaux. Le journaliste Frantz Duval, pour sa part, a résumé l’essentiel avec un simple constat devenu viral : « Haïti sera à la Coupe du Monde 2026 ».

L’impact de cette qualification dépasse largement le cadre sportif. Elle surgit dans un contexte où la population haïtienne subit une violence structurelle, où des centaines de milliers de personnes sont déplacées, où les institutions peinent à se maintenir debout, et où l’horizon national semble parfois se refermer. C’est précisément dans ce tunnel que cette victoire est apparue comme une lumière.

Le gouvernement, rappelant les efforts engagés pour soutenir le football local, notamment les 100 millions de gourdes alloués à la Fédération Haïtienne de Football, a interprété cet exploit comme une bouffée d’air pour un peuple meurtri.

Le Conseil Présidentiel de Transition a exprimé la dimension historique et patriotique du moment en affirmant : « Viktwa istorik kont Nikaragwa a louvri pòt Mondyal 2026 la pou Ayiti… Chak aksyon sou teren an te pote espwa, fyète ak kè kontan pou tout yon nasyon ».

Dans ce moment où l’identité haïtienne est mise à rude épreuve par la crise sécuritaire et l’exode massif, la qualification agit comme un rappel : Haïti n’est pas réductible à sa souffrance. Haïti est aussi, et peut-être surtout, un peuple qui résiste, qui crée, qui se réinvente. Que cette qualification ait été conquise en exil, loin du territoire, sans public, sans hymne résonnant dans un stade national, la rend encore plus puissante. Elle incarne la force d’un pays à genoux mais jamais vaincu. Elle rappelle que même dans l’adversité extrême, les Haïtiens gardent la capacité d’accomplir l’extraordinaire. Et en ce 18 novembre 2025, l’extraordinaire s’est manifesté avec la simplicité d’un cri devenu symbole : Haïti est de retour. Haïti va à la Coupe du Monde.

Catégories : AtualitésSport

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