Par Jean Wesley Pierre
Cayes, 9 mai 2025 – Le gouvernement haïtien, conduit par le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et supervisé par un Conseil présidentiel de transition en perte totale de crédibilité, s’est une nouvelle fois livré à une mise en scène pompeuse et creuse : les « Assises des Maires du Grand Sud ». Derrière l’apparente solennité de ces rencontres, organisées sous la houlette du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales, se cache un constat alarmant d’inefficacité, de duplicité et d’irresponsabilité politique.
Trois jours pour “réfléchir”, une décennie pour ne rien faire
La péninsule du Sud, ravagée par des catastrophes naturelles, l’insécurité, l’isolement structurel et le sous-développement, ne se relèvera pas avec des discours en amphithéâtre, aussi bien intentionnés soient-ils. Pendant que les officiels applaudissent les « synergies territoriales », les citoyens des 59 communes du Grand Sud subissent quotidiennement l’absence de routes praticables, l’indisponibilité de l’électricité, et l’insécurité grandissante. La police, sans moyens, et les élus locaux, désespérément livrés à eux-mêmes, n’ont ni les outils ni les marges de manœuvre pour mettre en œuvre les résolutions adoptées.
Fritz Alphonse Jean et le Conseil présidentiel : la continuité du vide
Le président du Conseil présidentiel, Fritz Alphonse Jean, pourtant chantre du changement au début de son mandat, semble désormais incarner la prolongation d’un système centralisé, inerte et déconnecté. La gouvernance territoriale reste marginalisée, alors qu’elle est l’un des rares leviers pour renforcer la démocratie et la justice sociale à l’échelle locale. Son silence sur les engagements concrets de l’État envers la péninsule Sud est éloquent. L’illusion de gouvernance ne suffit plus.
Alix Didier Fils-Aimé : un leadership de façade
Le Premier ministre, en se montrant le premier jour des assises, a sans doute voulu faire croire à une proximité avec les acteurs locaux. Pourtant, aucune politique claire de financement des collectivités, de décentralisation effective, ou de sécurité territoriale ne découle de son passage. C’est le syndrome du « politicien ak diplòm », dénoncé avec justesse par le réalisateur Richard Senecal : ces élites cultivées, instruites, mais profondément complices de l’effondrement national.
Où sont les résultats concrets ?
Depuis des décennies, les mêmes diagnostics sont répétés, les mêmes promesses refaites, les mêmes rapports produits. Pendant ce temps, la région reste à la merci des gangs, des tremblements de terre, et du désintérêt manifeste du pouvoir central. Qu’ont fait les autorités pour protéger les ports, développer l’agriculture, sécuriser les routes, soutenir les entreprises locales ? Rien, sinon organiser des « assises » et produire des communiqués. Pendant ce temps, la péninsule meurt à petit feu.
Conclusion : quand la République déserte ses territoires
Ces assises sont une mascarade de plus dans une République centralisée, corrompue et moralement en faillite. L’urgence n’est plus aux grandes messes politiques mais à la reddition de comptes, au transfert effectif des ressources aux collectivités territoriales, et à une politique de sécurité publique décentralisée, humaine et efficace. Le peuple du Sud n’a pas besoin de mots, il a besoin de routes, d’emplois, de justice, et de dignité.
Assez de poudre aux yeux. Il est temps de reconstruire le pays par le bas, avec ceux qui y vivent.
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