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Port-au-Prince, 2 octobre 2025. – Le couperet est tombé. Washington n’a pas renouvelé la loi HOPE/HELP, arrivée à expiration le 1er octobre. Cette décision marque un tournant majeur pour l’économie haïtienne, alors que près de 90 % des exportations nationales reposent sur les dispositions préférentielles de ce dispositif.

Une dépendance critique

Depuis 2006, les lois HOPE (Haitian Hemispheric Opportunity through Partnership Encouragement) et HELP (Haiti Economic Lift Program) avaient offert aux entreprises haïtiennes, principalement dans le secteur textile, un accès préférentiel au marché américain. Ce régime spécial avait contribué à faire du secteur des manufactures la première source de devises du pays, employant plus de 50 000 travailleurs directs et générant des centaines de milliers d’emplois indirects.
La non-reconduction de ces avantages douaniers ouvre la voie à une crise sans précédent pour un secteur déjà fragilisé par l’insécurité, les pénuries d’énergie et la concurrence régionale.

Un revers pour le CPT et la diplomatie haïtienne

La fin de HOPE/HELP représente aussi une gifle politique et diplomatique. Le Conseil présidentiel de transition (CPT), qui avait multiplié les annonces en faveur du maintien de la loi, se retrouve fragilisé.

Laurent Saint-Cyr, président du CPT, avait fait du lobbying en personne, allant jusqu’à se rendre aux États-Unis accompagné de son beau-père, l’économiste Pierre Marie Boisson. Les résultats n’ont pas été au rendez-vous.

Le ministre des Affaires étrangères, Harvel Jean-Baptiste, est également en première ligne. Il s’était rendu à plusieurs reprises à Washington et avait affirmé avoir eu des échanges encourageants avec des hauts responsables américains. Sa crédibilité est aujourd’hui mise à mal.
De son côté, la nomination de Leslie Délatour comme ambassadeur aux États-Unis, présentée comme stratégique en raison de son expérience passée dans le plaidoyer pour HOPE/HELP, n’aura finalement pas permis de sauver la loi.

Quelles conséquences pour l’avenir ?

L’arrêt de HOPE/HELP menace directement des dizaines de milliers de familles qui dépendent des salaires versés par les zones franches et les usines d’assemblage. À court terme, les fermetures d’usines et les licenciements massifs semblent inévitables. À moyen terme, Haïti risque de perdre sa compétitivité face à des pays de la région, comme le Honduras ou le Nicaragua, qui continuent de bénéficier de régimes préférentiels similaires avec les États-Unis.

Les milieux économiques haïtiens redoutent une déstabilisation supplémentaire d’un pays déjà plongé dans une grave crise politique et sécuritaire. Certains analystes estiment que l’absence de cette loi pourrait priver l’État de plusieurs centaines de millions de dollars en recettes fiscales et douanières.

Une urgence nationale

Les syndicats ouvriers, les patrons d’usines et les économistes appellent désormais le gouvernement à ouvrir de nouveaux canaux de négociation avec Washington, tout en cherchant à diversifier les débouchés commerciaux d’Haïti.

Mais au-delà de la dimension économique, cet épisode illustre l’isolement diplomatique du pays et les limites du lobbying mené ces derniers mois. Pour beaucoup, la fin de HOPE/HELP symbolise un échec collectif de la classe dirigeante haïtienne à défendre l’un des rares acquis économiques des vingt dernières années.

Catégories : ÉconomiePolitique

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