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Port-au-Prince, le 26 août 2025 — Le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé s’est envolé ce mardi vers les États-Unis, laissant derrière lui une capitale sous tension où les rafales d’armes automatiques continuent de dicter le quotidien. Officiellement, il se rend à Washington pour participer à une réunion tripartite entre l’ONU, la CARICOM-EPG et l’OEA, consacrée au « renforcement de la stabilité d’Haïti ».

Sur l’agenda, des sujets maintes fois répétés : mise à jour de la feuille de route pour Haïti, réunion du « Groupe des amis d’Haïti », et promesses d’assistance pour ramener la paix. Des formulations déjà entendues dans les couloirs diplomatiques, mais qui peinent à trouver une traduction dans les rues de Port-au-Prince, où les habitants réclament d’abord le droit élémentaire de circuler sans crainte d’être kidnappés ou abattus.

Les contradictions de la diplomatie internationale

Cette mission illustre une fois encore le paradoxe haïtien : une diplomatie hyperactive à l’étranger, mais une gouvernance paralysée à l’intérieur. Depuis plus de vingt ans, les réunions internationales sur Haïti s’empilent, multipliant les communiqués, les plans de redressement et les promesses d’aide. Pourtant, le pays sombre un peu plus chaque jour dans le chaos : 85 % de la capitale est sous contrôle des gangs, la faim touche des millions de personnes et la confiance dans les institutions est au plus bas.

À quoi sert donc cette feuille de route internationale, souvent dictée depuis Washington, New York ou Port of Spain, si elle ne prend pas racine dans la réalité du terrain ? Nombre d’Haïtiens y voient davantage un instrument de gestion de crise pour rassurer les chancelleries qu’un véritable levier de transformation sociale.

La légitimité en question

Au-delà de l’efficacité de ces rencontres, se pose aussi la question de la légitimité des dirigeants haïtiens à parler au nom du peuple. Le Premier ministre Fils-Aimé, comme ses prédécesseurs, gouverne sans mandat populaire direct, dans un pays où les élections sont reportées indéfiniment. Ce déficit démocratique fragilise toute négociation internationale : comment convaincre les partenaires d’appuyer des mesures qui ne sont pas portées par une base populaire solide ?

Un peuple en attente de preuves

La mission diplomatique du chef du gouvernement ne sera jugée qu’à l’aune des résultats concrets. Les Haïtiens n’attendent ni de beaux discours, ni de nouvelles feuilles de route, mais des actes visibles : une baisse des violences, un rétablissement progressif des services publics, une lueur d’espoir dans une économie exsangue.

Le Premier ministre doit regagner la capitale le 28 août. Mais au retour, une question brûlante l’attendra : aura-t-il ramené autre chose que des promesses, ou ce voyage s’ajoutera-t-il à la longue liste des expéditions diplomatiques stériles qui n’ont jamais changé la vie des Haïtiens ?

Catégories : Politique

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