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Par Jean Wesley Pierre

Une nouvelle scène de guerre urbaine en plein cœur de la France. Huit blessés par balle, un quartier traumatisé, des habitants terrorisés : la fusillade qui a éclaté dans la nuit de jeudi à vendredi à Pissevin-Valdegour, à Nîmes, n’est pas une simple rixe de quartier. Elle est le symptôme d’un effondrement lent mais régulier de l’autorité de l’État dans certaines zones du territoire national.

Derrière les faits bruts – trois tireurs, des armes lourdes, des véhicules en fuite, et des douilles de calibre 222 Remington sur les trottoirs – se dessine un scénario devenu presque banal dans une France où les règles de la République cohabitent, ou plutôt s’effacent, devant celles des trafiquants.

Le prix du silence et de la cécité politique

Ce n’est pas la première fusillade dans ce quartier. Ce ne sera sans doute pas la dernière. Pourquoi ? Parce que la réponse institutionnelle est structurellement inadaptée. D’un côté, l’État annonce des « plans anti-drogue » ou « reconquête républicaine », et de l’autre, sur le terrain, les habitants assistent à des démonstrations de force quasi-militaires de groupes criminels lourdement armés, agissant en plein jour ou sous les néons des cités.
La comparaison est brutale mais révélatrice : ce que la France nie aujourd’hui dans ses quartiers populaires, elle dénonce à l’international. Quand la Syrie ou Haïti sombrent dans des zones hors contrôle, on parle d’« État failli » ou de « zones de non-droit ». Que dire alors des dizaines de quartiers en France où la loi est dictée non par les élus, mais par les chefs de réseau ? La seule différence est géographique.

Des armes de guerre dans des zones de paix

Le calibre 222 Remington découvert à Nîmes n’est pas un pistolet de quartier. C’est une munition de précision, utilisée dans le tir sportif ou la chasse au gros gibier. Le message est clair : les tireurs ne veulent pas simplement effrayer. Ils veulent éliminer.
Or, cette militarisation du trafic de drogue n’est pas nouvelle. Elle suit une logique économique : comme dans toute guerre de territoires, la montée en gamme des armements est une réponse à la concurrence, et un outil de dissuasion. La cité devient alors le champ de bataille d’un capitalisme sauvage, où la violence est le langage principal.

Là encore, l’analogie est frappante : ce sont les cartels mexicains qui ont popularisé cette logique de guerre de position dans les villes, et pourtant, c’est à Nîmes, Marseille ou Sevran qu’on en subit les répliques.

La République à reculons

Mais le plus alarmant reste ailleurs : dans l’absence de réponse systémique. La police intervient après les tirs. Les CRS patrouillent quelques jours. Puis tout s’évapore. On panse les plaies mais on ne soigne jamais la maladie. Car tant que l’économie parallèle continuera d’offrir des revenus quotidiens supérieurs à ceux que promet l’école ou le SMIC, les jeunes continueront de s’armer plutôt que d’étudier.

La République recule non seulement face aux armes, mais aussi face à l’indifférence et la peur, qui deviennent les normes dans ces quartiers. L’analogie ici est celle d’un navire percé : on écoppe sans jamais colmater la brèche. Et pendant ce temps, l’eau monte.

Une question de choix politique

Le traitement médiatique aussi participe de cette banalisation. On en parle un jour, puis on passe à autre chose. On évoque les “faits divers”, comme s’il ne s’agissait pas d’un fait de société majeur : celui de la République qui ne protège plus partout.

La situation à Nîmes n’est pas une anomalie locale. Elle est la conséquence d’un choix politique répété : désinvestir dans les politiques de prévention, d’éducation, de justice de proximité, au profit d’annonces spectaculaires mais sans lendemain.
À force de parler de “zones de non-droit”, c’est l’État lui-même qui se désengage de ses fonctions fondamentales : protéger, éduquer, garantir l’ordre. Ce n’est plus seulement un problème de police, mais un problème de projet national.

Du crépitement des balles au silence des réponses

Huit blessés à Nîmes. Combien demain à Marseille ? À Lyon ? À Toulouse ? Si la République ne veut pas devenir un archipel où certains vivent sous la loi, et d’autres sous les lois, il faut réagir. Pas par un énième plan de communication. Mais par un réinvestissement massif et durable dans les territoires abandonnés.
Car ce n’est pas seulement la paix civile qui est en jeu. C’est la cohésion nationale, l’idéal républicain, et la foi dans un avenir commun.

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Catégories : Atualités

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