Par la rédaction de Lawouze Infos
Port-au-Prince, 23 Octobre 2025 — Le ministère de la Justice et de la Sécurité publique (MJSP) a annoncé que plus de 220 partis politiques ont désormais régularisé leurs dossiers auprès de ses services. Un chiffre vertigineux pour un pays de près de 6 millions d’électeurs inscrits, soit un parti pour environ 27 000 électeurs. Statistiquement, chaque formation politique ne représenterait qu’environ 1,6 % du corps électoral, un ratio qui met en lumière la fragmentation extrême du paysage politique haïtien.
Ce morcellement traduit l’un des paradoxes majeurs de la vie publique en Haïti : une démocratie saturée de partis, mais dépourvue de véritables forces représentatives. Derrière la pluralité apparente se cache une faiblesse structurelle celle d’une classe politique souvent dépourvue d’idéologie claire, d’organisation durable et de lien réel avec les citoyens.
Lors des dernières élections présidentielles, plus de 50 candidats s’étaient alignés dans la course au pouvoir, confirmant une tendance devenue presque caricaturale : tout le monde veut devenir chef, mais personne ne veut servir. Cette inflation de candidatures a contribué à diluer le débat public, à affaiblir la légitimité des institutions, et à renforcer la méfiance des électeurs vis-à-vis d’un système perçu comme déconnecté des réalités sociales.
Selon plusieurs observateurs, cette prolifération de partis s’explique à la fois par l’absence d’un cadre légal rigoureux, la personnalisation excessive du pouvoir et la politisation de l’accès aux ressources publiques. Beaucoup de ces organisations existeraient davantage comme structures électorales temporaires ou canaux d’opportunisme politique que comme mouvements porteurs de projets collectifs.
Pour plusieurs analystes, cette situation reflète « une crise de leadership et de vision », où la politique n’est plus un espace de service public, mais un champ d’ambition individuelle. En conséquence, Haïti détient aujourd’hui l’un des taux de morcellement politique les plus élevés du continent, une situation qui fragilise la stabilité institutionnelle et complique toute perspective de gouvernance durable.
Dans un pays confronté à de multiples urgences insécurité, pauvreté, effondrement institutionnel, le besoin d’unité, de cohérence et de crédibilité politique se fait plus pressant que jamais. Mais à ce stade, le foisonnement des partis ressemble davantage à un symptôme de désordre qu’à un signe de vitalité démocratique.

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