Port-au-Prince, 9 mai 2025 — Par Jean Wesley Pierre
Dans un contexte de crise sécuritaire persistante, Haïti poursuit ses efforts diplomatiques pour mobiliser ses partenaires régionaux. Ce vendredi 9 mai 2025, le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé a reçu en audience l’Ambassadeur du Brésil en Haïti, Son Excellence Luís Fernando De Carvalho, et le Commandant en chef des Forces armées d’Haïti (FAd’H), le Lieutenant-Général Derby Guerrier. Cette rencontre de haut niveau marque une étape significative dans la redynamisation de la coopération bilatérale entre Port-au-Prince et Brasília, avec un accent particulier sur les enjeux de sécurité, de défense et de renforcement institutionnel.
Le Brésil n’est pas un acteur nouveau dans le paysage sécuritaire haïtien. Membre de la MINUSTAH (Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti) entre 2004 et 2017, le pays sud-américain avait assumé le commandement militaire de cette force internationale pendant plus d’une décennie. Fort de cette expérience, le Brésil semble aujourd’hui prêt à jouer un rôle plus ciblé, bilatéral et respectueux de la souveraineté nationale haïtienne.
Lors de la rencontre, les discussions ont porté sur les modalités d’un partenariat durable, notamment dans la perspective de formations militaires, d’échanges techniques et d’appui logistique. Ce renforcement militaire, s’il est mis en œuvre avec transparence et coordination, pourrait représenter un levier important pour une FAd’H en quête de moyens, de professionnalisation et de légitimité.
L’un des points centraux abordés lors de cette réunion a été la tenue des prochaines élections en Haïti, dans un climat marqué par la prolifération des groupes armés et la fragilité institutionnelle. Le Premier ministre a rappelé que la restauration de la sécurité est une condition sine qua non à l’organisation de scrutins crédibles, inclusifs et transparents.
D’un point de vue sécuritaire, la stabilisation du pays ne pourra se faire sans une approche combinée : renforcement des capacités des forces nationales, opérations ciblées contre les gangs armés, réforme de la justice et appui de partenaires étrangers dans un cadre strictement défini. L’expertise du Brésil en matière de pacification urbaine et de coopération militaire pourrait donc constituer un atout précieux, à condition que cette assistance évite les écueils du passé.
Au-delà de l’enjeu sécuritaire immédiat, le gouvernement haïtien entend faire de cette coopération un levier pour renforcer la gouvernance républicaine et la crédibilité des institutions. L’objectif affiché : restaurer un ordre constitutionnel viable et durable. Mais les défis restent de taille. Outre les pressions internes, les autorités doivent naviguer dans un contexte régional et international où les priorités ne sont pas toujours alignées avec les besoins locaux.
L’ouverture affichée par le Brésil, dans un esprit de solidarité sud-sud, pourrait néanmoins offrir à Haïti une alternative constructive, moins intrusive que certaines interventions occidentales passées, tout en favorisant un dialogue stratégique sur la sécurité, la souveraineté et le développement.
La rencontre entre le Premier ministre haïtien, l’ambassadeur du Brésil et le commandant des FAd’H traduit une volonté politique claire : s’orienter vers une coopération sécuritaire réaliste, respectueuse et mutuellement avantageuse. Reste à voir si cette volonté pourra se traduire, sur le terrain, en résultats concrets et durables.
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