Alors que le ministre de la culture Patrick Delatour a officiellement annoncé que les dates prévues pour le Carnaval 2025 sont le 2, 3 et 4 mars à Fort-Liberté, au cours d’une édition des “Mardis de la Nation” réalisée le mardi 11 février; le thème retenu pour cette année, “Haïti debout ! Ayiti Kanpe !”, sonne comme un paradoxe dans un contexte national marqué par l’insécurité, la précarité économique et une crise sociopolitique sans précédent.
En dépit des promesses de décentralisation et de valorisation du patrimoine historique haïtien, les déclarations de l’artiste Shabba, défendant du bec et des ongles l’organisation des festivités, soulèvent des questions éthiques et morales qui ne peuvent être ignorées.
La situation sécuritaire en Haïti est plus que préoccupante. Les bandes armées continuent de semer la terreur dans des endroits stratégiques comme Kenscoff, Port-au-Prince, Nazon, Delmas 30, Fort National et Carrefour-Feuilles. Les attaques répétées contre la population civile, les enlèvements et les pillages ont plongé le pays dans un état de chaos permanent. Dans ce contexte, l’annonce d’un carnaval, même sous le prétexte de redynamiser l’économie locale, semble déconnectée des réalités vécues par des millions d’Haïtiens.
Les travaux annoncés pour Fort-Liberté, tels que la réfection des routes, la réhabilitation du Fort Saint-Joseph et la modernisation des infrastructures numériques, sont louables. Cependant, ces projets ne peuvent masquer l’urgence de la situation : la population réclame avant tout la sécurité, la stabilité et des solutions concrètes pour lutter contre le grand banditisme.
Dans ce climat de désespoir, les déclarations de l’artiste Shabba, membre du groupe Ekip, ont de quoi choquer. En affirmant que le budget du carnaval ne saurait construire des écoles ou des hôpitaux, mais qu’il peut offrir un “bref répit” au peuple, l’attitude de Shabba révèle une profonde insensibilité face à la détresse des Haïtiens. Son argument selon lequel le carnaval générera des revenus financiers pour la population est non seulement cynique, mais aussi irresponsable.
Comment peut-on justifier des dépenses somptuaires pour des festivités alors que des familles entières luttent pour survivre au quotidien ? Comment peut-on prétendre aimer le peuple tout en soutenant des activités qui détournent l’attention des véritables priorités : la sécurité, l’éducation, la santé et la lutte contre la corruption ?
Il est également troublant de noter que Shabba et son groupe Ekip sont associés à l’ancien parlementaire Profane Victor, récemment arrêté pour complicité avec des gangs armés. Cette proximité soulève des questions sur les véritables motivations derrière la défense acharnée du carnaval. Est-ce vraiment pour le bien-être du peuple, ou pour servir des intérêts personnels et politiques ?
Face à cette situation, il est impératif que le peuple haïtien prenne position. Les festivités carnavalesques, aussi divertissantes soient-elles, ne doivent pas servir de diversion pour masquer les échecs de l’État dans la lutte contre l’insécurité et la corruption. Les Haïtiens doivent exiger des actions concrètes de la part de leurs dirigeants : un renforcement des forces de l’ordre, une véritable réforme du système judiciaire et une allocation transparente des ressources publiques.
Par ailleurs, il s’avère important que la communauté internationale réoriente ses aides. Soutenir ou financer des événements comme le carnaval dans un contexte aussi critique revient à fermer les yeux sur la souffrance du peuple haïtien. Au lieu de participer à des activités “sinistres et macabres”, comme le qualifie un observateur, la communauté internationale devrait se concentrer sur des initiatives qui renforcent la sécurité et la stabilité en Haïti.
Le Carnaval 2025 à Fort-Liberté ne doit pas être une célébration de l’insensibilité et de l’irresponsabilité. Alors que le pays est au bord du gouffre, il est temps de prioriser les besoins réels de la population plutôt que de dépenser des millions dans des festivités éphémères. Shabba et ceux qui partagent son point de vue doivent réaliser que le véritable amour pour le peuple se manifeste par des actions concrètes, et non par des paroles creuses et des divertissements superficiels.
Le peuple haïtien mérite mieux. Il mérite un avenir où la sécurité, la dignité et la justice ne sont pas des slogans vides, mais des réalités tangibles. Il est temps de dire “Assez !”et d’exiger un changement radical.
Lawouze Info
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